Chapitre VI. La procédure législative/ Section 4. Le droit d'amendement / Exercice/

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France

Exercice

En toute logique, alors que le Gouvernement peut déposer des amendements devant l’une et l’autre des assemblées, les parlementaires ne peuvent le faire que devant l’assemblée à laquelle ils appartiennent.
L’efficacité du droit d’amendement est garantie par une réglementation minutieuse qui s’efforce de concilier la nécessaire liberté d’expression et le bon ordonnancement des débats

A) - Présentation matérielle

Dans la mesure où le débat législatif s’organise autour des amendements déposés, il est indispensable à la clarté et à la loyauté des débats que la portée de chaque amendement puisse être exactement mesurée par tous.

D’où les règles suivantes :

Les amendements doivent être formulés par écrit, signés par au moins un de leurs auteurs et déposés sur le bureau de l’Assemblée (c’est-à-dire, en pratique, auprès du service de la Séance) ou en commission. La même exigence de présentation par écrit s’applique aux sous-amendements.
Tout amendement comporte un dispositif qui précise son insertion dans le texte et son contenu et un exposé sommaire, qui décrit brièvement l’objectif de l’amendement.

À la demande de son auteur, et si la commission saisie au fond en est d’accord, un amendement peut faire l’objet d’une évaluation préalable par le comité d’évaluation et de contrôle des politiques publiques (CEC).

B) - Objet

Les Règlements des deux assemblées énoncent que les amendements et les sous-amendements ne sont recevables que s’ils s’appliquent effectivement au texte qu’ils visent ou, s’agissant d’articles additionnels, s’ils sont proposés dans le cadre du projet ou de la proposition de loi concernée ou, au minimum, s’ils ne sont pas dépourvus de tout lien avec l’objet du texte en discussion. Dans les cas litigieux, la question de leur recevabilité est soumise, avant leur discussion, à la décision de l’assemblée concernée. Seuls l’auteur de l’amendement, un orateur contre, la commission et le Gouvernement peuvent intervenir à l’occasion de cette discussion.

En pratique, cette procédure est très rarement mise en œuvre ; en revanche, le Conseil constitutionnel censure régulièrement des dispositions qu’il juge « dépourvues de tout lien avec l’objet du texte soumis au Parlement », refusant par-là d’accepter la pratique dite des « cavaliers législatifs ».

En ce qui concerne les sous-amendements, ils doivent également ne pas contredire le sens de l’amendement et ne peuvent être eux-mêmes sous-amendés.

C) - Dépôt et diffusion de l’amendement

Pour permettre une discussion ordonnée et cohérente des articles d’un projet de loi et des amendements qui s’y rapportent, la formalité du dépôt et le respect de la date limite qui s’y applique sont des conditions impératives de sa mise en discussion. En effet, ne sont mis en discussion que les amendements et les sous-amendements déposés sur le bureau des assemblées.

Le dépôt de l’amendement peut se faire, en fonction des circonstances, soit directement devant la commission, saisie au fond ou pour avis, soit devant le service de la séance, qui les centralise, les numérote, en harmonise la présentation. Au Sénat, une application informatique spécifique permet directement le dépôt en ligne des amendements. Chaque amendement est ensuite imprimé, distribué et mis en ligne sur les sites Internet des assemblées ; la collection complète de tous les amendements déposés sur un texte déterminé, qui constitue la « liasse », est ainsi disponible pour tous ceux qui le souhaitent le jour où s’ouvre le débat en séance plénière.

Concernant le délai de dépôt, les règlements des deux assemblées divergent légèrement ;

A l’Assemblée nationale, les amendements des députés doivent être déposés au secrétariat de la commission au plus tard à 17 heures le troisième jour ouvrable précédant l’examen du texte en commission ; ce même délai s’applique aux amendement déposés sur le texte discuté en séance.

Des délais particuliers sont prévus pour l’examen de la deuxième partie des projets de loi de finances : les amendements rattachés à l’examen des crédits doivent être déposés au plus tard l’avant-veille de la discussion à 13 heures, ceux présentés aux articles non rattachés au plus tard la veille à 13 heures.

Après l’expiration des délais susvisés, restent recevables les sous-amendements, les amendements du Gouvernement et ceux des commissions saisies au fond ou pour avis, les amendements portant sur les articles modifiés ou ajoutés par un amendement du Gouvernement ou de la commission au fond déposé hors délais.

Au Sénat, une date limite pour le dépôt des amendements en commission figure dans la convocation adressée aux membres de la commission, communiquée aux groupes et publiée au Journal Officiel En général, il s’agit de l’avant-veille de la réunion. Concernant les amendements au texte discuté en séance, ce délai de dépôt est fixé au début de l’examen en séance, cette limite n’étant pas opposable aux amendements de la commission saisie au fond, à ceux du Gouvernement et aux sous-amendements.

Les amendements et sous-amendements sont imprimés, distribués et mis en ligne sur les sites des assemblées. Concrètement, les députés disposent, en commission comme en séance publique, d’une liasse regroupant tous les amendements et sous-amendements classés par ordre d’examen. Tout amendement porte naturellement le nom de son auteur.

En commission, les amendements peuvent avoir pour auteurs le Gouvernement, le rapporteur, le cas échéant le rapporteur pour avis et les autres députés. En séance publique, on distingue les amendements du Gouvernement, ceux des commissions saisies au fond ou pour avis, et les amendements des députés. Il faut souligner que les amendements adoptés par la commission lors de la réunion consacrée à l’examen du rapport sont intégrés au texte qui servira de base à la discussion en séance publique (sauf dans le cas où on discute sur la base du projet).

D) - Discussion des amendements en commission

Le principe est que chaque amendement doit avoir été examiné par la commission saisie du projet, ou de la proposition, sur lequel il porte avant l’ouverture du débat en séance plénière.

Le Gouvernement peut d’ailleurs s’opposer à la discussion des amendements qui n’ont pas été soumis à la commission saisie au fond, en application de l’article 44, al. 2 de la Constitution. Cette arme de procédure n’est généralement utilisée qu’en cas d’obstruction manifeste, à l’égard d’amendements déposés après la dernière réunion de la commission.

Cependant, dans la pratique, un très grand nombre d’amendements sont examinés en séance sans l’avoir été auparavant en commission ; dans cette hypothèse, le plus souvent, le rapporteur exprime son avis personnel sur l’amendement.

E) - Discussion des amendements en séance

L’Assemblée nationale, comme le Sénat, ne délibère pas sur les amendements qui ne sont pas soutenus en séance, c’est-à-dire hors la présence de l’un au moins des signataires.

L’ordre d’appel des amendements en séance publique est rigoureusement déterminé par les Règlements des assemblées : ils sont examinés au fur et à mesure que viennent en discussion les articles sur lesquels ils portent et, lorsqu’il y a plusieurs amendements en concurrence sur un même article, par ordre d’éloignement décroissant de cet article. Un « dérouleur », document établi par le service de la Séance, donne l’ordre d’intervention des parlementaires lors de la discussion générale et l’ordre d’examen des amendements, article par article.

A l’Assemblée nationale, Les amendements présentés par le Gouvernement ou par la commission saisie au fond ont priorité de discussion sur les amendements des députés ayant un objet identique. Dans ce cas, la parole est donnée à tous les auteurs d’amendements et il est procédé à un seul vote sur l’ensemble de ces amendements.
Au Sénat, un amendement retiré par son auteur, après que sa discussion a commencé, peut être immédiatement repris par un sénateur qui n’en était pas signataire. La discussion se poursuit à partir du point où elle était parvenue.

Les interventions sur chaque amendement sont également limitées de façon stricte dans leur nombre et leur durée. Peuvent être successivement entendus : l’auteur de l’amendement ou son représentant, le président ou le rapporteur de la commission saisie au fond puis le cas échéant de la commission saisie pour avis(à l’Assemblée nationale), le Gouvernement, et, éventuellement, un orateur d’opinion contraire.

Sur chaque amendement, le temps de parole des intervenants est limité. Il est de deux minutes à l’Assemblée nationale sauf en cas de recours au temps législatif programmé où seul est décompté le temps global accordé au groupe politique et il est de trois minutes au Sénat ; le temps de parole du Gouvernement et, au Sénat, celui du rapporteur de la commission, n’est pas limité.

Aucune explication de vote sur les amendements n’est admise à l’Assemblée nationale, le Sénat les autorisant en revanche sans limitation de nombre et pour une durée de cinq minutes pour chaque intervenant.