Chapitre VIII. Les procédures de contrôle/ Section 1. Le contrôle politique/ Les procédures sans vote/

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Les procédures sans vote

Certains débats et certaines périodes à l’Assemblée nationale permettent d’effectuer un contrôle politique des actions du gouvernement, mais sans pour autant donner lieu à un vote à l’issue de l’échange. Les députés ont alors l’occasion de remettre en question ou de critiquer les choix du gouvernement, mais l’Assemblée ne se prononce pas formellement quant à ces choix. Ces occasions de contrôle sont le débat sur le discours d’ouverture de la session, la période des questions et réponses orales, les débats de fin de séance de même que les débats d’urgence.

La période des questions et réponses orales

D’une durée de 45 minutes, la période des questions et réponses orales est un exercice auquel se livrent les députés à chaque séance de l’Assemblée. Elle est sans contredit la période des travaux de l’Assemblée la plus connue et suivie par la population. C’est donc celle qui contribue, en grande partie, à façonner l’image des parlementaires. La « période des questions », comme elle est couramment appelée, est un moyen privilégié de contrôle des activités gouvernementales par l’Assemblée. Il s’agit d’un temps où les échanges sont souvent vigoureux et où la présidence doit faire preuve d’une grande vigilance en matière d’ordre et de décorum. En effet, il revient au président de diriger et de gérer cette période souvent fertile en rebondissements. Même si elle est principalement dévolue aux députés de l’opposition, les députés ministériels peuvent y participer. Toutefois, ils se prévalent rarement de ce droit.
Tant les questions posées par les députés lors de la période des questions que les réponses fournies par les ministres font l’objet d’un encadrement procédural prévu dans le Règlement de même que dans les précédents et les usages.

Ainsi, le Règlement prévoit que les questions doivent porter sur des affaires d’intérêt public, ayant un caractère d’actualité ou d’urgence, qui relèvent d’un ministre ou du gouvernement. Dans le cas contraire, elles doivent plutôt prendre la forme de questions écrites inscrites au feuilleton. De même, le Règlement prévoit expressément que les questions ne peuvent comporter ni expression d’opinion, ni argumentation, ni être fondées sur des suppositions, ni avoir pour objet d’obtenir un avis professionnel ou personnel, ni suggérer la réponse demandée, ni être formulées de manière à susciter un débat.
Les questions posées par les députés aux ministres lors de la période des questions sont de deux ordres. D’abord, il y a les questions principales, qui consistent à entamer un échange sur un sujet entre un député et un ministre. Ces questions doivent être brèves et peuvent contenir un court préambule pour les situer dans leur contexte. Ensuite, chaque question principale peut faire l’objet d’une ou de plusieurs questions complémentaires. Ces dernières doivent être brèves et précises. Elles doivent se rattacher à la question principale ainsi qu’aux réponses fournies par le gouvernement.

Outre la distinction à faire entre les questions principales et les questions complémentaires, les questions doivent satisfaire à certains critères de fond et de forme pour qu’un député puisse être autorisé à les adresser à un ministre. De plus, il existe un certain encadrement quant à l’objet et au sujet des questions. C’est le président qui doit voir à faire respecter ces règles, tout en étant conscient que la période des questions appartient d’abord et avant tout aux députés. Habituellement, le président se fait discret sur l’objet et le contenu des questions et laisse aux députés le soin de déterminer sur quoi doit porter une question.

Quant à la réponse du ministre, celle-ci doit être brève, se limiter au point qu’elle touche et ne contenir ni expression d’opinion ni argumentation. Aucun rappel au Règlement ne peut être fondé sur l’opinion que la réponse à une question posée à un ministre est insatisfaisante. Toutefois, la présidence a établi qu’un rappel au règlement peut reposer sur le fait que la réponse à une question ne porte pas sur le sujet de la question. Cela diffère du fait de prétendre que la réponse à une question est insatisfaisante.

Même si une question est habituellement adressée à un ministre en particulier, rien n’assure le député qui pose la question que la réponse viendra de ce ministre. De fait, toute question est destinée en quelque sorte au gouvernement. Ce dernier peut donc décider quel ministre répondra à la question. D’ailleurs, le Règlement prévoit expressément qu’un ministre peut agir au nom d’un autre ministre. Ainsi, le gouvernement peut répondre soit par la voix du premier ministre, soit par la voix de tout autre membre du gouvernement. Un ministre à qui une question est adressée peut refuser d’y répondre, notamment s’il juge contraire à l’intérêt public de fournir les renseignements demandés.

Le ministre à qui une question est posée peut y répondre à l’issue de la période des questions ou au cours d’une séance subséquente. C’est alors une « réponse différée ». Le ministre peut recourir à celle-ci lorsqu’il ne dispose pas de l’information nécessaire pour répondre à une question ou encore pour le faire de façon complète. Dans un tel cas, il mentionne à l’Assemblée qu’il prend avis de la question.
Les débats de fin de séance

Comme nous l’avons déjà précisé, la période des questions n’est pas une période de débats où les députés peuvent discuter de certains sujets en long et en large, mais plutôt une période prévue pour demander des renseignements aux membres du gouvernement. Or, tout député qui estime qu’un sujet qu’il a abordé lors de la période des questions a été insuffisamment approfondi peut soulever un débat de fin de séance. Un tel débat peut avoir lieu les mardi ou jeudi de chaque semaine pendant la période des travaux réguliers. Le débat a lieu à 18 h. La suspension ou la levée de la séance, selon le cas [1], est retardée en conséquence.

Le député qui demande la tenue d’un débat de fin de séance doit avoir transmis au président un avis indiquant le sujet qui doit faire l’objet d’un débat au plus tard trente minutes après la fin de la période des questions. Le président fait part à l’Assemblée dans les meilleurs délais du sujet qui fera l’objet d’un débat.
Si plusieurs débats de fin de séance ont été demandés, le président détermine l’ordre dans lequel ils se dérouleront en tenant compte de l’ordre de réception des avis, de l’urgence des questions, de l’alternance entre les groupes parlementaires et de la présence de députés indépendants. En général, les débats se déroulent selon l’ordre de réception des avis.

Il ne peut y avoir plus de trois débats de fin de séance. Si plus de trois débats sont demandés, la présidence doit alors décider quels débats seront tenus. Cependant, si toutes les demandes proviennent du même groupe d’opposition, la présidence pourra laisser à ce dernier le choix entre les sujets qu’il veut débattre.

À 18 h, le débat en cours est automatiquement ajourné. L’Assemblée procède alors aux débats de fin de séance. Si l’Assemblée a terminé ses travaux avant 18 h, son consentement unanime est requis pour procéder immédiatement aux débats de fin de séance.
Le député qui a soulevé le débat et le ministre qui lui répond ont chacun un temps de parole de cinq minutes. Le député qui a soulevé le débat a ensuite droit à une réplique de deux minutes.

Les débats d’urgence

Tout député peut demander la tenue d’un débat d’urgence. À cette fin, il doit, au plus tard une heure avant la période des affaires courantes, remettre un avis écrit de sa demande au président. Celle-ci ne doit être accompagnée que de brèves explications. Il ne peut être demandé plus de deux débats au cours d’une même séance, et un seul peut être tenu.

Le président décide sans discussion si la demande est recevable. Si la demande est reçue, il est procédé à un débat restreint d’une durée de deux heures. En période de travaux intensifs, même si la priorité doit être donnée au programme législatif du gouvernement, il est possible de demander un débat d’urgence.

Le président doit, pour autoriser la tenue d’un débat d’urgence, s’assurer que tous les critères énoncés dans le Règlement sont respectés. Il doit en arriver à la conclusion que la question faisant l’objet de la demande porte sur un sujet précis, d’une importance particulière, qui relève de l’Assemblée et ne peut ni n’aurait pu être discuté autrement. Cependant, avant de se prononcer sur ces critères, il lui faut vérifier si la demande satisfait aux conditions de forme imposées par le Règlement. Le non-respect de ces conditions entraîne l’irrecevabilité de la demande.

Il revient au président de déterminer s’il y a effectivement urgence de tenir un débat, celle-ci étant d’ailleurs le principal critère de recevabilité. Ainsi, la présidence pourra autoriser un débat s’il s’agit d’une crise soudaine et aiguë ou s’il y a une aggravation subite de la situation.

Outre l’urgence, un autre critère a été jugé déterminant par la jurisprudence. C’est celui en vertu duquel le sujet ne peut ni n’aurait pu être discuté autrement. Par ailleurs, le fait qu’un sujet a déjà été abordé n’empêche pas qu’il peut toujours y avoir urgence d’en discuter en raison d’éléments nouveaux. Enfin, lorsqu’elle doit apprécier si l’Assemblée aura des occasions prochaines de discuter d’un sujet faisant l’objet d’une demande de débat d’urgence, la présidence ne peut présumer de questions hypothétiques, telles que la possibilité que l’Assemblée soit dissoute.

Une demande de débat d’urgence est irrecevable lorsque le problème soulevé n’est pas de la responsabilité administrative du gouvernement. Il en va de même lorsque la compétence de la province n’est pas clairement établie ou lorsque le sujet échappe à la compétence de l’Assemblée nationale.

[1En période de travaux réguliers, l’Assemblée siège le mardi de 13 h 30 à 21 h 30, avec suspension de 18 h à 19 h 30. Le jeudi, elle siège de 9 h 30 à 18 h, avec suspension de 13 h à 15 h.