Chapitre VII. Les différentes catégories de lois / Section 4. Les lois de finances/

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Section 4. Les lois de finances

Dans un système de démocratie parlementaire de type britannique, la Couronne a une complète initiative en matière financière. Ainsi, la Couronne, sur avis de ses ministres, fait connaître à l’Assemblée les besoins financiers du gouvernement. Après l’étude par l’Assemblée de ces besoins, seule une loi gouvernementale portant affectation de crédits peut permettre à ce dernier de dépenser des sommes d’argent [1]. Ce privilège de l’exécutif avait traditionnellement pour objet de permettre au Parlement d’octroyer au souverain les deniers dont il avait besoin pour l’exercice de ses activités [2].
Les articles 54 et 90 de la Loi constitutionnelle de 1867 établissent les assises des prérogatives de la Couronne en matière financière. Cette initiative financière consiste à saisir l’Assemblée de mesures financières et connaît son aboutissement lorsque l’Assemblée adopte ou rejette ces mesures. C’est pourquoi, dans le cadre des débats de l’Assemblée, seul un ministre peut présenter un projet de loi ou une motion qui a une incidence financière, c’est-à-dire qui a pour objet l’engagement de fonds publics, l’imposition d’une charge aux contribuables, la remise d’une dette envers l’État ou l’aliénation de biens appartenant à celui-ci. Les rapports entre le gouvernement et le Parlement en matière financière peuvent être résumés de la manière suivante :
« The Sovereign, being the executive power, is charged with the management of all the revenue of the State, and with all payments for the public service. The Crown, therefore, acting with the advice of its responsible ministers, makes known to the Commons the financial requirements of the government ; the Commons, in return, grant such aids or supplies as are required to satisfy these demands ; and they provide by taxes, and by the appropriation of other sources of the public income, the ways and means to meet the supplies which they have granted. Thus the Crown demands money, the Commons grant it, and the Lords assent to the grant : but the Commons do not vote money unless it be required by the Crown ; nor do they impose or augment taxes, unless such taxation be necessary for the public service, as declared by the Crown through its constitutional advisers [3]. »

Chaque année financière, deux étapes majeures marquent le processus budgétaire. D’une part, il y a le dépôt du budget des dépenses annuelles ou supplémentaires qui est, en quelque sorte, le point de départ du processus budgétaire. L’adoption des lois qui portent affectation par le Parlement des crédits en est, pour sa part, l’aboutissement. Le Parlement recourt à deux types d’autorités législatives pour autoriser le gouvernement à dépenser, soit les crédits permanents et les crédits votés annuellement [4] .
D’autre part, l’autre étape importante au cours d’une année financière consiste en la présentation du discours du budget par lequel le gouvernement expose de façon générale sa politique budgétaire, c’est-à-dire ses besoins financiers et les moyens par lesquels il entend y faire face.

Le processus budgétaire désigne donc le mécanisme par lequel le gouvernement soumet à l’Assemblée nationale, pour approbation, sa politique budgétaire et ses prévisions de dépenses annuelles. Il sollicite ainsi l’autorisation de prélever les recettes nécessaires pour couvrir ces mêmes dépenses.

LES CREDITS BUDGETAIRES

Dans les pages qui suivent, nous nous pencherons d’abord sur les mécanismes d’étude et d’approbation du budget des dépenses ou, en d’autres termes, des crédits budgétaires. Nous aborderons ensuite la procédure régissant la livraison du discours du budget et l’adoption par l’Assemblée de la politique budgétaire du gouvernement.

1 LES CREDITS PERMANENTS

Nous venons de voir que le Parlement utilise deux types d’autorités législatives pour permettre au gouvernement de dépenser : les crédits permanents et les crédits votés annuellement. Les premiers n’ont pas à être votés annuellement par l’Assemblée nationale, car ils sont déjà autorisés législativement de façon permanente par une loi :
« Appelés aussi "crédits statutaires", ces crédits n’ont pas à être votés annuellement parce qu’ils sont déjà autorisés de façon permanente par la loi ordinaire qu’ils servent à appliquer. Cette loi prévoit que les sommes nécessaires à son application sont prélevées sur le fonds consolidé du revenu. L’autorisation ainsi donnée est permanente et sans limitation aucune, sous réserve des normes législatives et réglementaires pouvant régir par ailleurs l’exécution des dépenses concernées : niveau de salaires, montant des allocations, etc. Ces crédits concernent généralement des activités ou des charges auxquelles le législateur a décidé de conférer un certain caractère d’inaltérabilité ou de durabilité [5]. »
À titre d’exemple, il en est ainsi pour les crédits de l’Assemblée nationale. De fait, l’article 126 de la Loi sur l’Assemblée nationale prévoit que « [l]es sommes requises pour l’application de la présente loi [sur l’Assemblée nationale] sont prises sur le fonds consolidé du revenu [6] ».
Même si les parlementaires n’ont pas à voter chaque année les crédits déjà accordés par le Parlement de façon permanente, ils sont toutefois informés, dans le budget des dépenses soumis au Parlement, du montant que représentent annuellement les crédits permanents, formalité expressément prévue dans la Loi sur l’administration publique [7].

2 LES CREDITS ANNUELS

L’Assemblée étudie également des crédits pour lesquels le gouvernement demande annuellement son approbation. C’est pourquoi, dans le jargon parlementaire, ces crédits sont qualifiés de « crédits annuels ».
La période de l’étude des crédits budgétaires par l’Assemblée est un important exercice de contrôle parlementaire qui permet notamment à ses membres de scruter les divers éléments de l’ensemble des programmes budgétaires du gouvernement et de questionner les ministres responsables quant à leur application.
Le dépôt des crédits annuels ou du budget annuel des dépenses a normalement lieu à l’une des séances précédant le 1er avril, date du début de la prochaine année financière, à l’étape des affaires courantes prévue pour les dépôts de documents. Il doit être accompagné d’un message du lieutenant-gouverneur recommandant ces crédits à la considération de l’Assemblée, conformément à l’article 54 de la Loi constitutionnelle de 1867 [8] .
Selon le Règlement de l’Assemblée nationale (RAN), la procédure habituelle d’adoption des crédits budgétaires donne lieu d’abord à l’étude et à l’adoption des crédits provisoires en commission plénière et à un examen approfondi de l’ensemble des crédits en commission permanente. Puis, l’Assemblée adopte un projet de loi de crédits qui autorise le gouvernement à puiser à même le trésor public jusqu’à concurrence des montants indiqués dans le projet de loi. Au cours d’une année financière, le gouvernement peut également déposer à l’Assemblée des crédits budgétaires supplémentaires. À l’instar des crédits provisoires, les crédits supplémentaires sont étudiés en commission plénière.

L’ETUDE DES CREDITS PROVISOIRES

L’étude des crédits budgétaires débute par l’adoption des crédits provisoires au cours d’une séance de la commission plénière. Celle-ci doit avoir lieu avant le 1er avril. Ainsi, au terme de l’année financière du gouvernement [9] , l’Assemblée nationale peut adopter un projet de loi de crédits représentant le quart de l’ensemble des crédits [10].
Le débat entourant l’étude des crédits provisoires en commission plénière dure au plus cinq heures. Les parlementaires peuvent alors discuter non seulement des crédits provisoires mais de l’ensemble des prévisions budgétaires que le gouvernement se propose de faire adopter par l’Assemblée. Cette étude est prioritaire [RAN, art. 280].
Le sujet des échanges entre les députés et les ministres responsables de l’application des différents programmes budgétaires ainsi que l’horaire de ces échanges ont habituellement lieu suivant une entente préalable entre les groupes parlementaires. Cette entente est par la suite entérinée par l’Assemblée et devient alors un ordre de celle-ci. Or, comme la présidence l’a déjà reconnu [11], un ordre spécial a priorité sur toute disposition du Règlement à laquelle il déroge implicitement. À titre d’exemple, si l’ordre spécial prévoit un échange d’une durée de deux heures entre un ministre et les membres de la commission plénière, cet échange se poursuit indépendamment des heures fixées par le Règlement pour la suspension ou la levée d’une séance.
Quant aux autres modalités de l’étude des crédits provisoires, celles-ci ne sont pas prévues dans le Règlement. Ainsi, le président pourra s’inspirer des règles régissant l’étude des crédits en commission permanente pour déterminer les temps de parole des députés et des ministres. Il pourra également se baser sur les règles relatives à l’étude des crédits supplémentaires [12].
Au terme du temps alloué pour ces échanges, le président de la commission plénière met aux voix en bloc le quart des crédits budgétaires pour la nouvelle année financière. La commission plénière fait ensuite rapport à l’Assemblée nationale qui se prononce sans débat sur ce rapport ainsi que sur le projet de loi de crédits y faisant suite [RAN, art. 281].
Avec les sommes d’argent ainsi débloquées, le gouvernement peut assumer ses obligations pour la durée de la période qui précède l’adoption de l’ensemble des crédits annuels du gouvernement.

L’ETUDE DES CREDITS ANNUELS EN COMMISSION PERMANENTE

Immédiatement après l’adoption du projet de loi sur les crédits provisoires, le leader du gouvernement propose par voie de motion l’envoi en commission permanente de l’étude de l’ensemble des crédits budgétaires du gouvernement. Cette motion ne nécessite pas de préavis et elle n’est pas débattue [RAN, art. 281].
L’étude des crédits budgétaires en commission débute au plus tôt quinze jours après leur dépôt à l’Assemblée [RAN, art. 282]. Cela permet aux députés de prendre connaissance des détails des propositions budgétaires du gouvernement, en vue d’un meilleur exercice de contrôle parlementaire. L’étude en commission ne peut excéder deux cents heures, le temps consacré à chaque ministère ne pouvant dépasser vingt heures [RAN, art. 283]. Pendant dix séances consécutives, du lundi au vendredi, les commissions étudient les crédits budgétaires dans les domaines de leur compétence. Durant cette période, l’Assemblée ne procède qu’aux affaires courantes [RAN, art. 282]. L’absence d’une période des affaires du jour empêche donc la tenue de tout débat, y compris le débat sur une affaire prioritaire, comme le discours d’ouverture de la session [13]. Il ne peut y avoir non plus de débats de fin de séance, puisque ceux-ci ont lieu aux affaires du jour [14]. Cela permet donc aux parlementaires de consacrer la majorité de leur temps à l’étude des crédits budgétaires en commission, ce qui démontre l’importance de l’exercice.
Si le Règlement est muet quant aux modalités de l’étude des crédits provisoires et supplémentaires, il n’en est pas ainsi pour l’étude des crédits en commission, puisque l’article 285 prévoit un mécanisme à cet égard, soit une réunion des leaders convoquée par le président de l’Assemblée. Selon cet article, avant que l’étude des crédits en commission débute, le président de l’Assemblée convoque une réunion des leaders des groupes parlementaires pour préciser les modalités de cette étude. Outre qu’elle permet de répartir entre les commissions les deux cents heures prévues pour l’étude des crédits, cette réunion donne généralement l’occasion aux leaders de s’entendre sur différentes modalités dont l’horaire des commissions et les crédits à étudier. Le président communique ensuite cette entente à l’Assemblée et, la plupart du temps, indique qu’il convoquera une nouvelle réunion des leaders pour préciser toute autre modalité, si cela est nécessaire.
Quoi qu’il en soit, l’Assemblée a déterminé dans son règlement le mécanisme qu’elle entend privilégier pour l’organisation de l’étude des crédits, soit diverses ententes intervenues lors d’une réunion des leaders. Le président d’une commission doit donc appliquer les modalités qui découlent de ce mécanisme d’organisation des travaux et, en cas de problèmes à cet égard, ne doit pas hésiter à soumettre la question aux leaders.
Au cours de l’étude des crédits en commission, ceux-ci sont mis aux voix. Il n’y a pas de procédure prévue dans le Règlement quant à la forme que doit prendre la mise aux voix. Les députés peuvent alors approuver, diminuer ou rejeter les crédits demandés [RAN, art. 288]. Les raisons pour lesquelles une commission ou l’Assemblée ne peut augmenter les crédits soumis à sa considération sont une conséquence logique du principe de l’initiative financière de la Couronne, le gouvernement disposant de l’entière initiative de faire connaître ses besoins financiers et de les soumettre à la considération de l’Assemblée. Ainsi, comme cette dernière ne peut jouer aucun rôle d’initiative en matière financière, il va de soi qu’elle ne peut proposer d’augmenter les crédits demandés par le gouvernement.

L’ADOPTION DES CREDITS PAR L’ASSEMBLEE

Au terme de l’étude des crédits en commission permanente, les rapports des commissions sont déposés ensemble à l’Assemblée. À la séance suivante, ils font l’objet d’un débat restreint de deux heures au cours duquel, suivant le principe de l’initiative financière de la Couronne, seul un ministre peut proposer un amendement en vue de rétablir des crédits diminués ou rejetés en commission [RAN, art. 288]. Ce débat est prioritaire [RAN, art. 87].
L’Assemblée nationale se prononce ensuite, le cas échéant, sur l’amendement, puis sur les rapports regroupés, amendés ou non, et sur le projet de loi de crédits qui y fait suite. Elle doit au préalable avoir statué sur les motions de censure proposées lors du débat sur le discours du budget et sur la motion du ministre des Finances proposant d’approuver la politique budgétaire du gouvernement [RAN, art. 288].
Après l’adoption des rapports de commissions ayant étudié les crédits budgétaires, l’Assemblée procède à la présentation, à l’adoption du principe et à l’adoption du projet de loi des crédits qui y fait suite. Il peut arriver cependant que le vote sur les rapports des commissions soit reporté aux affaires courantes de la séance suivante. Dans ce cas, une fois le vote terminé, l’Assemblée doit attendre de retourner à ses affaires du jour afin de procéder à la présentation, à l’adoption du principe et à l’adoption comme telle du projet de loi des crédits [15]. Ces trois étapes sont cependant indivisibles et ont lieu au cours de la même séance. C’est pourquoi les restrictions de l’article 22, en vertu duquel un projet de loi présenté après le 15 mai ou après le 15 novembre ne peut être adopté pendant la même période, ne s’applique pas à un projet de loi des crédits [16]. De plus, ces étapes ne donnent lieu à aucun débat et ne sont pas considérées comme prioritaires, contrairement au débat restreint sur les rapports de commissions ayant étudié les crédits budgétaires [17] .

L’ETUDE DES CREDITS DE L’ASSEMBLEE

Au terme de l’étude des crédits des ministères, une séance de la commission plénière est consacrée à l’étude des crédits de l’Assemblée nationale. Cette séance est prioritaire [RAN, art. 286]. Nous avons vu dans la section 2.2.1.1 que les crédits de l’Assemblée nationale, suivant les dispositions de l’article 126 de la Loi sur l’Assemblée nationale, sont des crédits permanents qui n’ont pas à être adoptés chaque année par l’Assemblée [18]. Le Bureau de l’Assemblée nationale doit cependant les approuver. La séance de la commission plénière ne conduit donc à aucune décision [19] . Il s’agit toutefois d’une occasion pour les députés de questionner le président sur la gestion de l’Assemblée et sur le soutien qui leur est offert par les services administratifs de l’Assemblée. C’est également le moment pour le président de livrer aux parlementaires de l’information et ses réflexions sur l’administration de l’Assemblée nationale.

L’ETUDE DES CREDITS SUPPLEMENTAIRES

À tout moment au cours de l’année financière, le gouvernement peut soumettre à la considération de l’Assemblée un budget supplémentaire de dépenses : il est alors question « de crédits supplémentaires ». Ceux-ci peuvent servir à couvrir une dépense imprévue ou à satisfaire des besoins supérieurs aux prévisions initiales.
Lorsque des crédits supplémentaires sont déposés à l’Assemblée, l’étude en est faite en commission plénière, sur motion sans préavis et non débattue du leader du gouvernement [RAN, art. 289]. Le Règlement ne contient aucune disposition précise eu égard à l’organisation de l’étude des crédits supplémentaires. Tout au plus, l’article 290 prévoit qu’au début de l’étude un représentant de chaque groupe parlementaire peut prendre la parole pendant vingt minutes. Puis, le représentant du gouvernement a droit à une réplique de même durée. À l’instar de ce qui se produit concernant l’organisation de l’étude des crédits provisoires, certaines modalités entourant les échanges durant l’étude des crédits supplémentaires peuvent être déterminées préalablement par une entente entre les groupes parlementaires. Le contenu de cette entente fait ensuite l’objet d’un ordre spécial adopté par l’Assemblée, lequel a priorité sur toute disposition du Règlement à laquelle il déroge implicitement [20].
À défaut d’un ordre de l’Assemblée établissant une liste d’intervenants ministériels [21], il n’est pas possible d’exiger la présence d’un ministre en particulier lors de l’étude des crédits supplémentaires. Le choix du ministre qui répond de ces crédits est laissé à l’appréciation du gouvernement, l’article 290 du Règlement prévoyant uniquement la présence d’un représentant du gouvernement [22]. Le ministre peut être accompagné de fonctionnaires, mais ces derniers prendront la parole uniquement avec son consentement et celui de la commission ; les conseillers de députés d’opposition peuvent aussi être présents [23].
La durée de l’étude en commission ne doit pas excéder huit heures pour l’ensemble des crédits [RAN, art. 291]. Auparavant, la pratique voulait que, à moins qu’un vote ne soit demandé dès la fin d’un échange, la commission plénière, au terme de ses travaux, vote tour à tour les crédits de chaque ministère avant de se prononcer sur l’ensemble des crédits supplémentaires [24]. Maintenant, la pratique semble plutôt vouloir que, au terme de chaque échange, le président, s’il y a lieu [25], met aux voix les crédits du programme visé. À la fin du dernier échange, le président met aux voix les crédits sur lesquels la commission plénière ne s’est pas encore prononcée.
Le rapport de la commission est soumis à l’Assemblée qui se prononce sans débat sur le rapport ainsi que sur le projet de loi qui y fait suite [RAN, art. 291]. Comme il ne peut y avoir de débat sur le rapport, aucun amendement ne peut donc être présenté, contrairement à ce que prévoit l’article 288 du Règlement qui permet à un ministre de proposer un amendement en vue de rétablir des crédits annuels diminués ou rejetés par une commission permanente. Par conséquent, sitôt le rapport de la commission plénière présenté à l’Assemblée, le président le met aux voix. S’il est adopté, le projet de loi qui y fait suite doit contenir l’ensemble des crédits adoptés par la commission sans tenir compte, le cas échéant, de ceux qui ont été rejetés par celle-ci.

LE DISCOURS DU BUDGET ET LE DEBAT SUR LE DISCOURS DU BUDGET

Alors que les crédits budgétaires constituent le budget des dépenses qu’entend effectuer le gouvernement au cours d’une année financière, le discours du budget représente une prévision des besoins financiers de l’État et des ressources nécessaires à leur couverture. Cependant, le discours du budget est plus que cela. Étant donné que son contenu n’est pas régi par la procédure parlementaire, il devient souvent un moyen politique permettant au gouvernement de livrer certains messages à la population. En l’espèce, outre qu’il constitue une sorte de tableau sommaire des dépenses et des recettes publiques prévues pour un exercice financier, il donne souvent lieu à des annonces du gouvernement sur ses priorités en matière budgétaire ainsi que sur ses stratégies de développement économique et social. Dans certains cas, les mesures qui y sont annoncées sont d’application immédiate. Ainsi, selon les auteurs Dussault et Borgeat :
« [Une règle], fondée sur la tradition, veut que les mesures fiscales annoncées dans le Discours sur le budget prennent effet dès la date qui y est mentionnée, qui peut être celle de la présentation du Discours lui-même ou une autre date, même si les projets de loi présentés à l’appui de ces mesures ne seront adoptés et sanctionnés qu’ultérieurement. Autrement dit, la perception des impôts débute avant même l’adoption de la législation habilitante ; une disposition prévoyant la rétroactivité donne force à ce principe [26]. »
Contrairement à ce qui se passe dans certaines assemblées, il n’existe au Québec aucune contrainte législative qui oblige le gouvernement à présenter un nouveau budget pour chaque année financière. Cependant, sur un strict plan de contrôle parlementaire, le Règlement rend nécessaire un discours du budget avant l’adoption des crédits budgétaires pour chaque année financière [27]. Cela explique pourquoi le discours du budget est habituellement prononcé au printemps, soit peu avant ou peu après le dépôt des crédits annuels. Cependant, même si le Règlement rend obligatoire la tenue d’un discours du budget pour chaque année financière, il ne contient aucune exigence quant au moment où le discours doit être prononcé et quant à son contenu. C’est donc dire, d’une part, que plus d’un budget peut être présenté pour une même année financière et, d’autre part, que son contenu n’est pas restreint à cette seule année financière, mais peut englober plusieurs années.

LE DISCOURS DU BUDGET

Le discours du budget et le débat qui s’ensuit durent au plus vingt-cinq heures, dont quinze à l’Assemblée et dix à la Commission des finances publiques. Le discours et le débat à l’Assemblée sont prioritaires [RAN, art. 272].
Le discours du budget peut avoir lieu à n’importe quel moment des affaires du jour. Il ne peut donc être prononcé lors de l’étude des crédits annuels en commission, puisqu’il n’y a pas d’affaires du jour pendant cette période, l’Assemblée ne procédant alors qu’aux affaires courantes. Il peut se tenir avant ou après l’étude des crédits en commission [28], mais avant que l’Assemblée se soit prononcée sur l’ensemble des rapports des commissions sur l’étude des crédits annuels et sur le projet de loi de crédits qui y fait suite [RAN, art. 288]. Comme nous l’avons vu précédemment, l’Assemblée doit avoir statué sur les motions présentées lors du débat sur le discours du budget et sur la motion du ministre des Finances proposant d’approuver la politique budgétaire du gouvernement avant de se prononcer sur les crédits budgétaires.

Aucun préavis ne doit être donné au feuilleton avant le prononcé du discours du budget. En effet, il n’existe aucun usage, ni aucune coutume, ni aucune disposition réglementaire qui exige qu’un préavis soit donné au feuilleton avant la lecture du discours du budget [29].
Au terme de son discours, le ministre des Finances propose une motion par laquelle il demande que l’Assemblée approuve la politique budgétaire du gouvernement. L’article 271 du Règlement de l’Assemblée nationale n’accorde aucune marge de manœuvre au ministre quant à la formulation de sa motion. Comme les termes de cette dernière ne varient pas, il n’est pas nécessaire qu’elle soit écrite [RAN, art. 190]. Cela explique en partie pourquoi elle ne peut être amendée, même s’il s’agit d’une motion de fond. Un député, par l’entremise d’une motion d’amendement, ne pourrait avoir plus de latitude que le ministre des Finances lui-même. En effet, comme le précise la présidence dans une directive rendue en 2007, rien dans le Règlement ne permet de présenter des amendements à la motion du ministre des Finances, l’article 274 du Règlement prévoyant plutôt la possibilité pour les députés de présenter une motion de censure (et maintenant une motion pour formuler un grief). Or, selon la présidence, si l’on avait voulu permettre un amendement à la motion du ministre des Finances, le Règlement n’aurait pas autorisé concurremment la présentation d’un autre type de motion [30].
Selon une pratique bien établie, au cours de son discours, le ministre des Finances dépose certains documents contenant des renseignements supplémentaires sur les mesures annoncées. Toutefois, le dépôt de ces documents est conditionnel à l’obtention du consentement de l’Assemblée, afin de déroger à l’article 53 du Règlement, lequel prévoit notamment que le dépôt de documents a lieu à l’étape des affaires courantes prévue à cette fin. En l’absence de ce consentement, le dépôt ne pourrait avoir lieu au moment du prononcé du discours du budget, ce qui n’empêcherait pas le ministre des Finances de procéder à ce dépôt à la séance suivante à l’étape des affaires courantes prévue pour le dépôt de documents. Selon la présidence, le fait que ces documents ne sont pas déposés immédiatement n’influe en rien sur le processus prévu dans le Règlement qui indique uniquement que le discours du ministre des Finances se termine par une motion proposant que l’Assemblée approuve la politique budgétaire du gouvernement. L’opportunité ou non de déposer de tels documents ne relève pas de la procédure parlementaire, mais bien de l’initiative du ministre, et il appartient aux députés, au moment de la demande de consentement, d’évaluer la pertinence de pouvoir en disposer [31].

Le discours du ministre ne peut excéder deux heures. Immédiatement après, le critique financier de chaque groupe parlementaire d’opposition a droit à dix minutes de commentaires [RAN, art. 271].
Il est d’usage de n’accepter aucune question de règlement ou de privilège avant [32] et pendant [33] le prononcé du discours du budget. Cela dit, le président peut accepter une question de règlement une fois ce discours terminé. Il en est de même pour une question de privilège faite en vertu du premier alinéa de l’article 69 du Règlement [34], pourvu qu’elle soit fondée sur des faits venant de survenir en Chambre, c’est-à-dire dans l’enceinte de l’Assemblée, et qu’elle ne concerne pas une fuite de renseignements, la doctrine et les précédents ayant confirmé qu’une fuite sur le discours du budget ne relève pas de privilèges parlementaires [35] . En effet, la coutume selon laquelle la préparation du discours du budget est entourée du secret le plus absolu est une convention politique qui repose essentiellement sur des principes d’équité et de justice. Cette convention a pour principal objectif d’éviter que des particuliers ne profitent d’information privilégiée en vue de réaliser des profits illicites. Par ailleurs, l’application rigoureuse de cette convention s’appuie sur un principe parlementaire tout aussi fondamental, à savoir que les grandes orientations du gouvernement devraient être divulguées aux députés en Chambre avant que le public en général en soit informé [36].

LE DEBAT SUR LE DISCOURS DU BUDGET

Le débat auquel donne lieu le discours du budget débute à la deuxième séance suivant le prononcé du discours [RAN, art. 273]. Ce délai a pour objet de permettre aux députés de l’opposition de prendre connaissance du discours du budget avant que commence le débat à l’Assemblée et, surtout, de donner l’occasion au représentant de l’opposition officielle de préparer son discours, puisque l’article 273 du Règlement prévoit que le débat commence par ce discours qui peut durer deux heures.
Comme nous l’avons mentionné précédemment, le discours du budget et le débat qui s’ensuit sont prioritaires. De plus, les travaux des commissions sont suspendus pendant le discours du ministre des Finances et celui du représentant de chaque groupe parlementaire [RAN, art. 87].
Le débat se fait en trois parties, soit la première à l’Assemblée, la deuxième à la Commission des finances publiques et, enfin, la troisième de nouveau à l’Assemblée. La première partie à l’Assemblée constitue un débat restreint qui prend fin au plus tard lorsqu’il s’est écoulé treize heures et demie depuis le début du discours du ministre des Finances. Après le discours du représentant de l’opposition officielle, le président, à la suite d’une réunion avec les leaders, répartit le temps entre les groupes parlementaires en tenant compte de la présence de députés indépendants [RAN, art. 210].
Chaque député peut prononcer un seul discours, dans lequel tous les sujets peuvent être abordés. Il peut, au moment de son intervention, présenter une motion de censure ou une motion formulant un grief. Celle-ci ne requiert aucun préavis et ne peut être amendée [RAN, art. 274].
Lorsqu’il n’y a plus d’intervenants ou lorsqu’il s’est écoulé treize heures trente minutes depuis le début du discours du ministre des Finances, le débat est suspendu à l’Assemblée. Il se poursuit à la Commission des finances publiques au plus tard à la séance suivante [RAN, art. 275]. Cette partie du débat en commission permet aux députés de discuter avec le ministre de la politique budgétaire du gouvernement et de l’évolution des finances publiques. Elle tient lieu de réunion trimestrielle que la Commission doit consacrer à l’étude de la politique budgétaire du gouvernement et à l’évolution des finances publiques [RAN, art. 292].
Au terme du débat à la Commission des finances publiques, son président fait rapport à l’Assemblée dès la prochaine période des affaires courantes [RAN, art. 276].
Le débat reprend à l’Assemblée, dès l’appel des affaires du jour, par une intervention de trente minutes du représentant de l’opposition officielle. Il se termine par la réplique de une heure du ministre des Finances.
Le débat terminé, le président met aux voix les motions formulant un grief et les motions de censure présentées par les députés au cours du débat à l’Assemblée ainsi que la motion du ministre des Finances proposant l’adoption de la politique budgétaire du gouvernement [RAN, art. 277].

LA DECLARATION COMPLEMENTAIRE SUR LE BUDGET

Outre le discours du budget, le Règlement prévoit un autre véhicule par lequel le gouvernement peut soumettre sa politique budgétaire à l’Assemblée. L’article 278 du Règlement permet au ministre des Finances de faire une déclaration complémentaire sur le budget.
La déclaration complémentaire sur le budget est, comme son nom l’indique, complémentaire par rapport à un discours du budget prononcé au cours d’une année financière. Cela n’empêche toutefois pas le gouvernement de soumettre, au moment où il le juge opportun, un autre budget à l’Assemblée. En effet, l’existence de la déclaration complémentaire dans le Règlement ne peut être vue comme une limitation du principe constitutionnel de l’initiative financière du gouvernement, mais plutôt comme un véhicule moins contraignant que le discours du budget lorsque, en cours d’année budgétaire, le gouvernement veut apporter uniquement un complément au budget.
Les règles gouvernant le discours du budget et le débat qui y fait suite s’appliquent à la déclaration complémentaire sur le budget [37] . Toutefois, l’ensemble de la déclaration et du débat dure douze heures et demie, tandis que le temps de parole du ministre des Finances et celui des critiques financiers des groupes parlementaires d’opposition sont réduits de moitié [RAN, art. 278].

[1JD, 16 décembre 1991, p. 11643-11647 (Jean-Pierre Saintonge) / Recueil de décisions concernant la procédure parlementaire (RDPP), n° 233/2.

[2JD, 5 juin 1995, p. 3429 et 3430 (Roger Bertrand) / RDPP, n° 233/4 ; JD, 19 juin 1996, p. 2546 (Jean-Pierre Charbonneau) ; JD, 8 décembre 1999, p. 4135 et 4136 (Jean-Pierre Charbonneau) / RDPP, n° 233/6.

[3Erskine MAY, Treatise on the Law, Privileges and Usage of Parliament, 21e éd., Londres, Butterworths, 1989, p. 684.

[4Aucune somme ne peut être prise à même le fonds consolidé du revenu s’il n’y a pas d’autorisation législative expresse. À cet égard, les articles 27 et 28 de la Loi sur l’administration financière, L.R.Q., c. A-6.001, prévoient ce qui suit :
- « 27. Aucun paiement sur le fonds consolidé du revenu ne peut être fait, sauf à la demande d’un ministre, d’un sous-ministre, d’un dirigeant d’un organisme, d’un membre du personnel ou d’un titulaire d’un emploi du ministère ou de l’organisme autorisé à cette fin. Cette demande doit être faite suivant la forme prescrite par le Conseil du trésor et être accompagnée des documents qu’il détermine.
- « 28. Aucune demande de paiement ne peut être faite sans que le demandeur ait attesté qu’il existe un fondement législatif pour effectuer le paiement et qu’il se soit assuré que :
1° la somme réclamée résulte d’une imputation régulière sur un crédit ;
2° la somme réclamée est due pour acquitter une obligation validement conclue ou qui a été exécutée conformément aux conditions qui y sont attachées ;
3° la demande de paiement et les modalités qui lui sont applicables sont conformes aux règles édictées par le Conseil du trésor. »

Il existe toutefois une exception au principe de l’autorisation législative préalable, soit le mandat spécial. Les articles 51 et 52 de la Loi sur l’administration publique, L.R.Q., c. A-6.01, prévoient ce qui suit :
- « 51. Quand l’Assemblée nationale ne siège pas en raison d’une interruption de ses travaux qui est prévue pour une période d’au moins 20 jours et qu’une dépense imprévue pour laquelle il n’a pas été pourvu par le Parlement est urgente et requise immédiatement pour le bien public, le gouvernement peut, sur le rapport du président du Conseil du trésor et du ministre des Finances à l’effet qu’il n’y a pas de disposition législative autorisant le paiement d’une dépense imprévue et du ministre responsable attestant l’urgence de ces coûts et sa nécessité dans l’intérêt public, donner un ordre de préparer un mandat spécial pour l’autorisation de la dépense d’un montant jugé nécessaire ; ce montant est signé par le lieutenant-gouverneur et le montant en est porté par le ministre des Finances à un compte constitué à cette fin.
- « 52. Un mandat spécial délivré en vertu de l’article 51 est un crédit pour l’année financière au cours de laquelle il est délivré. »
De même, l’article 92 de la Loi sur l’administration financière, L.R.Q., c. A-6.001, se lit comme suit :
« 92. Le contrôleur des finances prépare un état de tout rapport et mandat spécial produit conformément à l’article 51 de la Loi sur l’administration publique (chapitre A-6.01) ainsi que des dépenses et autres coûts y afférents.
Cet état est présenté à l’Assemblée nationale au plus tard le troisième jour suivant la reprise de ses travaux par le ministre qui a attesté l’urgence de la situation. »

[5René DUSSAULT et Louis BORGEAT, Traité de droit administratif, 2e éd., t. II, Sainte-Foy, Les Presses de l’Université Laval, 1986, p. 615 et 616.

[6Cependant, en vertu de l’article 125 de cette même loi, les prévisions budgétaires et les prévisions budgétaires supplémentaires de l’Assemblée sont préparées par le président en consultation avec le Bureau de l’Assemblée nationale. En outre, ce dernier doit approuver lesdites prévisions budgétaires.

[7L’article 47 de la Loi sur l’administration publique, L.R.Q., c. A-6.01, se lit comme suit :

« 47. Les crédits apparaissant au budget de dépenses doivent indiquer distinctement les crédits permanents qui sont déjà autorisés par la loi et que le Parlement n’a pas à voter, ceux qui sont déjà ou doivent être autorisés pour une période de plus d’un an ainsi que ceux qui doivent être autorisés annuellement par un vote du Parlement. »

[8Cette recommandation royale n’est toutefois pas nécessaire pour les documents de nature explicative qui ne contiennent aucune mesure visée par l’article 54 de la Loi constitutionnelle de 1867 (JD, 30 mars 2001, p. 513 515 (Jean-Pierre Charbonneau) / RDPP, n° 279/1). Cette disposition se lit comme suit :

« 54. Il ne sera pas loisible à la Chambre des Communes d’adopter aucune résolution, adresse ou bill pour l’appropriation d’une partie quelconque du revenu public, ou d’aucune taxe ou impôt, à un objet qui n’aura pas, au préalable, été recommandé à la chambre par un message du gouverneur général durant la session pendant laquelle telle résolution, adresse ou bill est proposé. »

[9Selon l’article 84 de la Loi sur l’administration financière, « l’année financière du gouvernement commence le 1er avril d’une année et se termine le 31 mars de l’année suivante ».

[10Il se peut cependant que l’Assemblée ne puisse se réunir avant le 1er avril, ce qui rend impossible l’adoption des crédits provisoires avant cette date. C’est le cas notamment lorsque l’Assemblée est dissoute en vue de la tenue d’élections générales. Dans ces circonstances, le gouvernement, pour faire face à ses dépenses courantes, peut avoir recours à un mandat spécial, conformément à l’article 51 de la Loi sur l’administration publique. En vertu de cette disposition, lorsque l’Assemblée ne siège pas en raison d’une interruption de ses travaux qui est prévue pour une période d’au moins vingt jours et qu’une dépense imprévue pour laquelle il n’a pas été pourvu par le Parlement est urgente et requise immédiatement pour le bien public, le gouvernement peut ordonner qu’un mandat spécial soit préparé pour le montant jugé nécessaire

[11JD, 3 mars 1999, p. 22 et 23 (Jean-Pierre Charbonneau) / RDPP, n° 18/1.

[12Voir la section L’ETUDE DES CREDITS SUPPLEMENTAIRES

[13JD, 24 avril 2001, p. 1038-1043 (Jean-Pierre Charbonneau) / RDPP, n° 282/2. Le débat sur le discours d’ouverture de la session ne perd pas son statut d’affaire prioritaire au sens du Règlement. Il devra être traité comme tel dès que l’Assemblée sera de nouveau autorisée à procéder à la période des affaires du jour, à la fin de l’étude des crédits.

[14JD, 24 mai 1990, p. 2693 (Jean-Pierre Saintonge) / RDPP, n° 308/2 ; JD, 15 avril 1986, p. 924 (Pierre Lorrain) ; JD, 24 avril 2001, p. 1038 et 1039 (Jean-Pierre Charbonneau).

[15JD, 17 mai 2001, p. 1299 (Jean-Pierre Charbonneau).

[16JD, 16 mai 2001, p. 1273 (Michel Bissonnet) / RDPP, n° 288/1.

[17JD, 17 mai 2001, p. 1281 (Raymond Brouillet) / RDPP, n° 288/2. En l’espèce, au terme du débat restreint sur les rapports des commissions ayant étudié les crédits budgétaires, le président avait mis aux voix les rapports regroupés des commissions. Un vote par appel nominal ayant été exigé, il avait été reporté à la période des affaires courantes de la séance suivante. Le leader de l’opposition officielle s’était alors opposé à ce que l’Assemblée passe à une autre affaire pour le motif que la présentation et l’adoption du projet de loi des crédits étaient prioritaires. La présidence avait rejeté cette objection en déclarant que seul le débat sur les rapports de commissions ayant étudié les crédits budgétaires était prioritaire.

[18JD, 30 avril 1996, p. 526 (Raymond Brouillet) / RDPP, n° 286/1.

[19Cela semble d’ailleurs expliquer que, de 1997 à 2009, avec le consentement de l’Assemblée, il n’y a pas eu de séance de la commission plénière consacrée à l’étude des crédits de l’Assemblée nationale.

[20Voir la section 2.2.1.2.1. consacrée à l’étude des crédits provisoires.

[21À défaut du consentement unanime de l’Assemblée, une motion d’organisation des travaux de la commission plénière nécessite un préavis (JD, 12 décembre 1994, p. 481-484 (Roger Bertrand) / RDPP, n° 290/1).

[22JD, 12 décembre 1994, p. 481-484 (Roger Bertrand) / RDPP, n° 290/1.

[23JD, 24 mai 2001, p. 1470 et 1471 (Raymond Brouillet) / RDPP, n° 108/1.

[24Par cette façon de faire, la commission plénière se trouvait à se prononcer deux fois sur la même question. Cela ne posait pas de problème lorsque tous les crédits étaient adoptés. Cela devenait plus complexe s’il y avait eu rejet de certains crédits par la commission plénière, comme cela a été le cas le 6 décembre 2002 où les crédits relatifs au programme 1 du ministère des Relations avec les citoyens et de l’Immigration ont été rejetés par la commission à la suite d’un vote par assis et levé. Dès lors, il devenait impossible pour la commission, à la fin de ses travaux, de se prononcer sur l’ensemble des crédits supplémentaires sans se retrouver avec deux votes contradictoires. À ce propos, une analogie peut être faite avec l’étude détaillée d’un projet de loi. Dans une décision rendue en 1999, la présidence de la commission plénière avait déclaré inutile la pratique qui voulait que, après avoir adopté les éléments constitutifs d’un projet de loi, la commission se prononce sur l’ensemble du projet de loi (JD, 4 juin 1999, p. 2258 (Michel Bissonnet) /RDPP, n° 244/6).

[25Il peut arriver qu’un échange ne porte pas sur un programme, mais sur les crédits en général. Le cas échéant, il va de soi qu’aucun vote n’a lieu au terme de l’échange. Il se peut aussi que les membres de la commission plénière conviennent de se prononcer sur l’ensemble des crédits accordés à un ministère plutôt que sur ceux qui sont prévus pour un programme en particulier. Dans un tel cas, le vote devrait normalement avoir lieu à la fin du dernier échange concernant ce ministère. Par ailleurs, les modalités de la mise aux voix des crédits peuvent être fixées dans l’ordre spécial adopté par l’Assemblée.

[26R. DUSSAULT et L. BORGEAT, op. cit., p. 722.

[27JD, 7 novembre 2001, p. 3494 et 3495 (Jean-Pierre Charbonneau) / RDPP, n° 278/1. En effet, l’article 288 du Règlement prévoit que l’Assemblée doit, avant d’adopter les crédits budgétaires pour une année financière, s’être prononcée au préalable sur la motion du ministre des Finances proposant que l’Assemblée approuve la politique budgétaire du gouvernement, ainsi que les motions de censure présentées à l’occasion du débat sur le discours du budget.

[28JD, 30 avril 1986, p. 1035 et 1036 (Pierre Lorrain) / RDPP, n° 282/1.

[29JD, 30 avril 1987, p. 7010-7016 (Pierre Lorrain) / RDPP, n° 271/1.

[30JD, 25 mai 2007, p. 845-847 (Michel Bissonnet) / RDPP, n° 271/5. Cette directive a été rendue dans le contexte d’un gouvernement minoritaire. Le président de l’Assemblée répondait à des questions qui lui avaient été adressées la veille par la leader du deuxième groupe d’opposition. Entre autres questions, celle-ci désirait savoir si, au cours du débat sur le discours du budget, il était possible, pour le gouvernement ou pour l’opposition, d’apporter des amendements et, dans l’affirmative, de quelle manière. Après avoir répondu par la négative à cette question, la présidence a ajouté que, quant à savoir si d’autres moyens procéduraux s’offraient au gouvernement, c’était à lui de les évaluer. À la suite de cette directive, le 1er juin 2007, la ministre des Finances a lu une déclaration ministérielle ayant trait à la politique budgétaire du gouvernement. Le même jour, elle a déposé des crédits supplémentaires pour l’année financière se terminant le 31 mars 2008, répondant ainsi à une demande du deuxième groupe d’opposition (P.-V., 1er juin 2007, p. 115 et 116).

[31Ibid

[32JD, 30 avril 1987, p. 7010-7016 (Pierre Lorrain) / RDPP, n° 271/1.

[33JD, 12 juin 2003, p. 330 et 331 (Michel Bissonnet) / RDPP, n° 271/3.

[34Ibid. Dans une autre décision rendue la même journée, la présidence précisait qu’une éventuelle question de privilège portant sur un fait qui se serait produit pendant le discours du budget devrait être faite seulement après les commentaires du critique financier de l’opposition officielle (JD, 12 juin 2003, p. 333 (Michel Bissonnet) / RDPP, n° 271/4).

[35JD, 12 juin 2003, p. 330 et 331 (Michel Bissonnet) / RDPP, n° 271/3. Toujours selon cette décision, dans la mesure où un ministre serait concerné par une allégation de fuite sur le budget, le paragraphe 316 (3) du Règlement ne saurait être le véhicule approprié non plus, étant donné qu’il doit être utilisé pour mettre en cause un acte accompli par un membre du Parlement dans l’exercice de ses fonctions parlementaires et non de ses fonctions ministérielles. Aux yeux de la présidence, la motion de censure apparaissait alors comme le seul moyen pour exprimer un blâme à un ministre à la suite d’une fuite de renseignements sur le budget.

[36Ibid. À ce propos, le président de l’Assemblée législative de l’Ontario a considéré comme constituant à première vue un outrage au Parlement le fait de présenter le budget à l’extérieur du Parlement, le gouvernement ayant justifié ce choix par son désir de communiquer directement avec la population (Journal des débats de l’Assemblée législative de l’Ontario, 8 mai 2003, p. 230-234).

[37Comme c’est le cas pour le discours du budget, la déclaration complémentaire sur le budget et le débat qui s’ensuit sont donc considérés comme des affaires prioritaires. De plus, les travaux des commissions sont suspendus pendant le discours du ministre des Finances et celui du représentant de l’opposition officielle, qui a lieu à la deuxième séance qui suit la déclaration complémentaire.