Chapitre VIII. Les procédures de contrôle/ Section 1. Le contrôle politique/ Les procédures sans vote/

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Les procédures sans vote

Pour être efficace, l’information du Parlement nécessaire à assurer sa mission de contrôle doit être permanente, diversifiée et proche de l’actualité. Il appartient au Gouvernement de pourvoir à ce besoin en communiquant spontanément et régulièrement au Parlement les informations les plus récentes sur un certain nombre de sujets, récurrents ou non. Il y procède au moyen de déclarations devant la représentation nationale, le plus souvent suivies d’un débat sans vote.

Dans le cadre de la séance mensuelle réservée à l’initiative parlementaire, chaque groupe politique peut choisir, pour compléter son information, d’organiser un débat sur un sujet donné.

Enfin, les questions posées au Gouvernement constituent pour les parlementaires une source inépuisable d’informations et un moyen de contrôle très prisé.

A) – Les déclarations du Gouvernement

En dehors des déclarations prévues à l’article 49 de la Constitution, le Gouvernement peut demander à faire devant l’Assemblée des déclarations, avec ou sans débat. Aucun vote, de quelque nature qu’il soit, ne peut avoir lieu à l’issue de ces déclarations du Gouvernement.

Dans le cas de déclaration avec débat, la Conférence des Présidents fixe un temps de parole global réparti entre les groupes en proportion de leur importance numérique, sachant que chaque groupe disposera d’un temps minimum de trente minutes, et que le premier député n’appartenant à aucun groupe qui s’est fait inscrire le premier dans le débat disposera de dix minutes. Le Premier ministre ou un membre du Gouvernement prend la parole le dernier pour répondre aux orateurs.

Lorsque la déclaration du Gouvernement ne comporte pas de débat, le Président peut autoriser un seul orateur à répondre au Gouvernement.

La Constitution prévoit que le Gouvernement fait une déclaration devant le Parlement dans trois cas :

- Lorsque le référendum prévu à l’article 11 est organisé sur proposition du Gouvernement, celui-ci fait, devant chaque assemblée, une déclaration qui est suivie d’un débat.

- En vertu de l’article 72-4 : " Le Président de la République [...] peut décider de consulter les électeurs d’une collectivité territoriale située outre-mer sur une question relative à son organisation, à ses compétences ou à son régime législatif. Lorsque la consultation porte sur un changement prévu à l’alinéa précédent et est organisée sur proposition du Gouvernement, celui-ci fait, devant chaque assemblée, une déclaration qui est suivie d’un débat."

- En vertu de l’article 35, dans sa nouvelle rédaction issue de la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008, « le Gouvernement informe le Parlement de sa décision de faire intervenir des forces armées à l’étranger au plus tard trois jours après le début de l’intervention ; cette information peut donner lieu à un débat sans vote. »

Le Gouvernement peut également, en vertu de diverses dispositions organiques faire une déclaration, suivie ou non d’un débat, devant le Parlement dans le cas suivants :

- en matière de politique financière et sociale :

- en matière de politique européenne, avant chaque réunion du Conseil européen des chefs d’État ou de gouvernement de l’Union européenne, le gouvernement fait devant le Parlement une déclaration, qui est suivie d’un débat.

- enfin, le Gouvernement peut faire devant le Parlement une déclaration sur un sujet d’actualité particulier. Ces déclarations couvrent l’ensemble des champs de l’activité publique (politique étrangère mais aussi énergie, éducation, sujets de société…) et peuvent être suivies d’un débat.

B) – Les débats d’initiative parlementaire

Dans chaque assemblée la conférence des présidents dispose désormais d’une certaine latitude pour fixer l’ordre du jour des semaines qui ne sont pas réservées par priorité à un ordre du jour fixé par le Gouvernement.

Les présidents des groupes et ceux des commissions peuvent faire des propositions d’inscription à l’ordre du jour lorsqu’il s’agit d’une semaine relevant de l’Assemblée ou du Sénat : leurs propositions doivent être adressées au Président de l’Assemblée au plus tard quatre jours avant la tenue de la Conférence. Pour les semaines de contrôle, chaque groupe d’opposition ou minoritaire a droit à l’inscription d’un sujet d’évaluation et de contrôle.

La place accordée à l’opposition dans la fixation de l’ordre du jour est très sensiblement améliorée. En effet, l’ordre du jour prioritaire accordé à l’opposition correspond à « un jour de séance par mois », soit trois séances à l’Assemblée nationale.

La Conférence des présidents arrête l’ordre du jour de cette journée sur le fondement des propositions d’inscription formulées par le groupe d’opposition ou minoritaire.


C) - Les Questions

Sous leurs différentes formes orales et écrites, les questions constituent la forme la plus ancienne et la directe de contrôle de l’action du Gouvernement par le Parlement.

Ces procédures sans vote, dont le caractère est individuel, permettent l’information des députés sur des sujets ponctuels et des points d’actualité sans mise en jeu de la responsabilité politique du Gouvernement.

Elles rencontrent aujourd’hui un succès croissant, dû autant à leur médiatisation (questions au Gouvernement) qu’à leur simplicité et leur caractère illimité (questions écrites).

1/ – Les questions orales

Le droit d’interroger le Gouvernement en séance a été consacré par la Constitution de 1958 et renforcé par la révision constitutionnelle de 1995. Désormais, « une séance par semaine au moins est réservée par priorité aux questions des membres du Parlement et aux réponses du Gouvernement » (article 48, al. 2 de la Constitution).

Dans ce cadre, l’Assemblée nationale et Sénat gèrent librement, en accord avec le Gouvernement, les séances de questions orales. A l’Assemblée nationale, les conditions de dépôt des questions sont ainsi fixées par le Bureau et l’organisation des séances est arrêtée par la Conférence des Présidents.

a – Les questions orales sans débat

Les questions orales sont posées par un député à un ministre, ce qui interdit toute question collective (en particulier celles que pourrait poser un président au nom d’un groupe politique ou d’une commission permanente).

Elles doivent être sommairement rédigées et se limiter aux éléments strictement indispensables à la compréhension de la question. Le texte de ces questions, très souvent d’intérêt local pour le député qui en est l’auteur, est remis au Président de l’Assemblée nationale, qui le notifie au Gouvernement.

A l’Assemblée nationale, les séances de questions orales sans débat sont concentrées pendant les semaines de contrôle, à raison d’une séance le mardi matin et d’une séance le jeudi matin. Le nombre de questions posées par séance a été porté de 25 à 32, avec une répartition entre les groupes calquée sur le principe de parité qui s’applique aux séances de questions au Gouvernement. Le temps disponible par question, réponse du ministre et droit de réplique compris, passe de 7 à 6 minutes. Au cours de la session 2008-2009, 15 séances de questions ont été organisées et 414 questions posées.

Au Sénat, la matinée de la séance du mardi est réservée par priorité aux questions orales. L’auteur de la question dispose de trois minutes pour la présenter ; le ministre lui répond pendant environ quatre à cinq minutes, puis l’auteur reprend la parole pour deux minutes maximum. En 2007-2008, le Sénat a discuté de 253 questions de ce type au cours de 16 séances.

b – Les questions orales avec débat

Si les questions orales avec débat sont tombées en désuétude à l’Assemblée nationale, elles continuent à être pratiquées au Sénat.

Chaque sénateur peut également remettre au Président une question orale accompagnée d’une demande de débat. Les conditions de dépôt, de recevabilité et de publication sont les mêmes que pour les questions écrites ou les questions orales. Ces questions sont inscrites à l’ordre du jour sur décision du Sénat faite sur proposition de la Conférence des Présidents

L’auteur de la question intervient toujours en premier et dispose d’un temps de parole de vingt minutes. Pour les autres intervenants, la Conférence des Présidents peut choisir entre deux procédures :

- soit elle organise le débat, c’est-à-dire fixe la durée globale de la discussion, répartie à la représentation proportionnelle des groupes politiques qui interviennent successivement dans l’ordre du tirage au sort ;

- soit elle accorde un temps de parole de dix minutes au représentant de chacun des groupes politiques et un droit de réponse de cinq minutes pour l’auteur de la question et chacun des intervenants.

Au cours de la session 2007-2008, le Sénat a discuté 13 questions orales avec débat.

c – Les questions au Gouvernement

A l’Assemblée nationale, la procédure des questions au Gouvernement a été mise en œuvre en 1974, en marge du Règlement par la Conférence des Présidents. A raison de deux fois (depuis 1995) une heure par semaine, les mardi et mercredi en début de la séance de l’après-midi, et ce même durant la discussion budgétaire et durant les sessions extraordinaires, les députés interrogent par oral les membres du Gouvernement qui leur répondent sans délai.

Le temps consacré à chaque question, réponse du ministre comprise, est de quatre minutes. Ainsi, 15 questions sont posées au cours de chaque séance, la parité entre la majorité et l’opposition est réalisée sur deux séances, à raison de 15 pour la majorité et 15 pour l’opposition. Les députés non inscrits peuvent poser une question tous les deux mois..

Le président de séance appelle les questions selon un ordre qui permet à chacun des groupes d’intervenir le premier, à tour de rôle, et qui fait alterner une question émanant d’un groupe majoritaire et une posée par un groupe d’opposition. Le président veille scrupuleusement au respect des temps de parole afin que l’ensemble des intervenants puisse bénéficier de la retransmission assurée en direct depuis 1981 par une chaîne de télévision publique.

Contrairement aux questions orales, les questions au Gouvernement ne sont ni déposées, ni notifiées, ni préalablement publiées. En principe, leur contenu n’est pas communiqué au Gouvernement, seuls les noms des auteurs lui sont transmis une heure avant l’ouverture de la séance. Le caractère spontané des questions et la présence de l’ensemble des membres du Gouvernement assurent une large audience à ces séances qui, grâce à leur retransmission télévisée constituent un temps fort de l’actualité parlementaire.

Le contenu des questions est libre (seules les injures et menaces sont interdites). Dans la pratique, la dualité questions orales – questions au Gouvernement permet de réserver les questions d’intérêt local aux premières et les questions politiques à caractère général aux secondes.

Pendant la session ordinaire 2008-2009, 816 questions ont été posées au Gouvernement au cours de 61 séances.

Dans le cadre de la séance réservée chaque mois au contrôle, la Conférence des présidents a décidé de l’organisation d’une nouvelle procédure de questions adressées à un ministre, qui s’apparente à la procédure des « questions crible » mise en œuvre entre 1989 et 1992.

Le temps réservé à cette procédure est fixé à 1 heure 30. La durée des questions comme celle des réponses est limitée à 2 minutes. Chaque auteur de question dispose d’un droit de réplique d’une minute, le temps de la réplique étant décompté sur celui du groupe concerné. En revanche, le temps de réponse du ministre n’est pas imputé sur celui du groupe.

Les deux groupes les plus nombreux – UMP et SRC – disposent d’un temps de 18 minutes, ce qui leur permet de poser 9 questions ou 6 si elles sont suivies d’une réplique. Quant aux deux groupes les moins nombreux – GDR et NC – ils disposent de 6 minutes ce qui correspond à 3 questions ou 2 si le droit de réplique est utilisé.

La Conférence des présidents, sur proposition alternée des groupes, détermine le ministre interrogé. En pratique, il peut s’agir d’un ministre interrogé sur l’ensemble de la politique de son ministère ou d’un ou plusieurs ministres interrogés sur un volet particulier de la politique du Gouvernement.

Au Sénat, où ces questions existent depuis 1982, les séances se déroulent le jeudi après-midi, tous les quinze jours, durent une heure et sont retransmises en direct sur France 3 et sur Public Sénat. L’auteur de la question et le ministre disposent chacun d’un temps de parole de deux minutes trente. Il n’existe aucun droit de réponse au Gouvernement et il n’est pas possible de se faire remplacer par un collègue.

Les dix questions (soit un total annuel de 180 questions) discutées lors de chacune des séances sont réparties entre les groupes politiques en fonction de leur importance numérique respective. L’ordre de passage des questions est fixé selon un « tourniquet » spécifique déterminé par un tirage au sort entre les différents groupes, effectué après chaque renouvellement sénatorial. Le nom de l’auteur et celui du ministre interrogé sont déposés par les groupes politiques le jour même de la séance avant onze heures. En revanche, afin de préserver la spontanéité des échanges, le texte de la question n’est pas officiellement connu au préalable.

L’ordre du jour du Sénat comporte également depuis octobre 2009, des questions cribles thématiques : elles sont inscrites à l’ordre du jour deux fois par mois. Les sénateurs disposent de deux minutes pour poser leur question et le ministre a deux minutes pour répondre. Les sénateurs ou un membre de leur groupe politique peuvent alors répondre au ministre en une minute.

2/ – Les questions écrites

Il s’agit également d’une prérogative individuelle des parlementaires. Elle est la seule procédure de ce type à s’exercer hors du cadre de la séance et dont l’effet est différé.

Les questions écrites sont posées par un député ou par un sénateur à un ministre ; seules celles qui portent sur la politique générale du Gouvernement sont posées au Premier ministre. Cette faculté n’est pas limitée : tout parlementaire peut déposer autant de questions écrites qu’il le souhaite.

Les questions écrites doivent être sommairement rédigées et se limiter aux éléments strictement indispensables à la compréhension de la question. Elles ne doivent contenir aucune imputation d’ordre personnel à l’égard de tiers nommément désignés. En outre, le principe de séparation des pouvoirs et d’irresponsabilité du chef de l’État interdit à l’auteur d’une question écrite de mettre en cause les actes du Président de la République.

Les questions concernent des sujets extrêmement divers (questions d’intérêt national ou local, problèmes individuels ou collectifs, etc.), mais il faut signaler qu’environ la moitié des questions écrites porte sur des problèmes fiscaux ou sociaux.

Le texte des questions écrites est remis au Président de chacune des assemblées, qui le notifie au Gouvernement. Depuis le début de la XIIIe législature, les députés seront invités à déposer leurs questions par voie électronique en utilisant un portail Internet spécialisé ou en les adressant comme pièce jointe à un courrier électronique. Les questions écrites sont publiées chaque semaine, durant les sessions et hors session, dans un fascicule spécial du Journal officiel qui comporte les réponses des ministres aux questions précédemment posées. Ces réponses doivent être publiées dans les deux mois suivant la publication des questions.

En raison de sa simplicité et de son caractère illimité, la procédure des questions écrites rencontre un très large succès. Elle permet en effet aux parlementaires d’intervenir quand ils le souhaitent (même en intersession) et autant qu’ils le souhaitent auprès des ministres pour des questions touchant souvent directement leurs électeurs. La première conséquence de ce constat est une inflation du nombre de questions écrites : de 3 700 questions écrites déposées en 1959, on est passé à 12 000, en 1994, et à environ 25 300 en 2008.

La procédure est victime de son succès car le Gouvernement éprouve des difficultés croissantes à répondre dans les délais réglementaires.

A l’Assemblée nationale, plusieurs initiatives ont été prises afin de remédier à ce problème dont, notamment :

Les réponses aux questions n’ont en principe aucune valeur juridique et ne lient pas l’administration, sauf en matière fiscale où elles sont considérées comme exprimant l’interprétation administrative des textes et, par conséquent, opposable à l’administration dans ses relations avec les contribuables.

Au cours de la session 2007-2008 (du 1er octobre 2007 au 30 septembre 2008), 25 758 questions écrites ont été posées, 19 150 questions écrites ont obtenu une réponse et 516 questions ont été « signalées », à l’Assemblée nationale. Au Sénat, 4 603 questions écrites ont été déposées, et 2 899 ont reçu une réponse.

La possibilité de procéder à des recherches de questions et de réponses par thèmes sur les sites Internet de l’Assemblée nationale ou du Sénat constitue un très précieux instrument de documentation accessible aux parlementaires, aux administrations et au public.